02/11/2014
une autre recension du livre sur le Père Clerc
Nous publions ci-après une recension de l’ouvrage sur le Père Alexis Clerc, par le R.P. Charles Daniel. Cette recension fut publié dans le numéro de mai 1896, de L’Université Catholique, revue mensuelle publiée sous la direction d’un Comité de Proviseurs des Facultés Catholiques de Lyon. (Nouvelle Série – Tome XXII. 15 mai – 13 août 1896).
1. Questions actuelles. – Religion, philosophie, histoire, art et littérature, par le R. P. Ch. Daniel,fondateur des Etudes religieuses. Précédées d’une notice et d’une introduction par les RR. PP. Mercier et Fontaine, S. J. 1896. 1 vol. in—8 de 489 pp. Paris et Poitiers, H. Oudin.
2. Alexis Clerc, marin, jésuite et otage de la commune, fusillé à la Roquette le 24 mai 1871. Simple biographie, par le R. P. Ch. Daniel, de la Compagnie de Jésus. 1895. 1 vol. in-12 de viii-496 pp. Paris, Téqui.
1. Le nom du P. Charles Daniel n’est pas encore oublié. Bien que des infirmités douloureuses l’aient condamné, à la fin de sa vie, à une inaction forcée, et lui aient fait rompre brusquement toute relation avec le monde, il a joué un rôle trop considérable pour que sa mémoire s’éteigne si vite, même à une époque où les préoccupations d’hier disparaissent si facilement devant les intérêts d’aujourd’hui. Il reste toujours le fondateur des Études religieuses, et son rédacteur le plus goûté de lapremière heure. Comme son activité a été en partie absorbée par des articles de revues, on pouvait craindre qu’elle n’eût plus d’influence sur les lecteurs d’à présent, qui ne songeraient guère à aller chercher ces études dans les collections où elles étaient enfouies. C’est ce qui a déterminé le P. Mercier à choisir les plus remarquables de ces travaux pour en composer un juste volume. Afin que nous puissions les comprendre plus parfaitement et entrer dans l’esprit de celui qui les a composés, le P. Mercier nous donne en même temps une biographie du P. Daniel, et le P. Fontaine a écrit une introduction très claire et très nette, où il nous explique l’occasion qui a fait naître les articles, et l’importance qu’ils eurent au moment de leur apparition.
Quel nom fallait-il donner à ce recueil, composé d’études si varices, nous allions dire si disparates ? Les éditeurs ont choisi celui de Questions actuelles, dont l’exactitude pourrait être discutée. Si l’on peut appliquer cette dénomination à des questions qui ont quelques rapports avec celles qui s’agitent aujourd’hui, qui peuvent, par exemple, se résoudre d’après les mêmes principes, nous n’avons aucune objection à opposer ici. Mais si l’on réserve cette appellation pour les problèmes qui sont à l’ordre du jour, et qui sont de nature à passionner le grand public, elle n’aurait pas dû être donnée à ce recueil. Ne chicanons pas d’ailleurs sur les mots. Nous avons lu avec plaisir et profit ce livre, où il y a tant de belles pages et tant de détails intéressants. L’humble et savant religieux écrit parfois d’une manière admirable, qui rappelle nos grands écrivains du xviie siècle. Dans les polémiques, il change de ton, et devient aussi vivant que précis, aussi pressant qu’imagé. Partout il mérite de retenir l’attention, soit qu’il rectifie un point des Mémoires de M. Guizot, soit qu’il célèbre avec enthousiasme Montalembert et ses Moines d’Occident, soit qu’il esquisse la biographie de Mme Swetchine, soit qu’il expose la banqueroute du protestantisme, soit qu’il montre le chemin qui mène de l’optimisme au panthéisme. Mais n’insistons pas plus longtemps sur ce recueil d’articles : nous avons parler d’un livre proprement dit composé par le P. Daniel nous voulons dire la biographie du P. Alexis Clerc, l’un des martyrs de la Commune.
2. Misericordias Domini in æternun cantabo[1]. Telles sont les paroles qu’un vieux peintre espagnol met dans la bouche de sainte Thérèse, comme si elles suffisaient à résumer toute sa vie. C’est aussi l’épigraphe que l’on pourrait donner à la biographie du pieux jésuite. On ne saurait assez admirer la miséricordieuse conduite de la Providence à son égard, et ce que peut la grâce dans la transformation de l’homme. A force de persévérance et de recherches, le P. Daniel est parvenu à reconstituer les détails de cette vie si extraordinaire, et qui devait finir par le martyre. Il est intéressant de suivre avec lui son héros à la maison paternelle, où il eut le malheur de perdre trop tôt sa mère, puis dans ces pensions où il s’habitua trop facilement à l’indifférence religieuse, et ensuite à l’École polytechnique, où il se fit aimer de tous par son enjouement et son heureux caractère. Alexis Clerc songea quelque temps à devenir professeur; puis, au grand étonnement de tous, il se fit marin. La Providence, semble-t-il, voulait l’arracher à la maison paternelle, où les exemples de son père, un des premiers actionnaires du Siècle, ne pouvaient être que pernicieux pour lui. C’est en plein océan Pacifique, dans l’archipel des îles Gambier, que devait commencer son retour à Dieu. Il fut émerveillé, comme l’avait été peu de temps auparavant le commandant Marceau, par le dévouement des missionnaires et les heureux effets de leur apostolat parmi les indigènes. Puis, avec sa droiture naturelle, il voulut connaître de plus près cette religion qu’il avait appris à aimer sur les genoux de sa mère, et qu’il avait tant négligée depuis. La Démonstration évangélique, de Duvoisin, suffit à le ramener. Quand il eut fait le dernier pas, en revenant à la pratique des sacrements, Il devint un apôtre, et contribua puissamment à convertir plusieurs de ses amis. Puis, en marchant d’un pas ferme et continu dans la voie de la perfection, il crut qu’il devait être quelque chose de plus qu’un marin, et il se fit jésuite.
On le vit alors, modeste surveillant de l’école préparatoire de la rue des Postes, conduire les élèves en promenade à travers les rues de Paris. Quand il eut été nommé professeur à la même école, il continua de faire le bien en cherchant le silence et l’oubli. Puis, à cinquante-un ans, en pleine activité scientifique et au moment où les moissons les plus abondantes semblaient réservées à son zèle, la guerre éclata, suivie des horreurs de la Commune. Et, pour le nom de Jésus-Christ, auquel il s’était donné tout entier, le P. Clerc tomba sous les balles des fédérés, après avoir ramené à Dieu un parlementaire imbu des traditions gallicanes, le président Bonjean.
Certes, c’est une vie et une mort bien enviables. Le P. Daniel nous les raconte avec un vrai talent d’écrivain, et la biographie qu’il a écrite est palpitante d’intérêt. Nous engageons ceux qui ne la connaissent pas encore à se la procurer, et à apprendre ce que fut cet éminent religieux, appelé à la troisième heure, mais ouvrier d’autant plus infatigable et sans reproche, operarius inconfusibilis.[2]
A.L.
19:20 Publié dans Biographie, Commune de 1871 | Lien permanent | Commentaires (0)
25/03/2014
Fac-similé d'un billet authentique
Après la première nuit passée dans sa nouvelle prison, le P. Clerc annonça à son frère son changement de domicile par un billet d’un laconisme significatif, écrit sous les yeux des guichetiers et des agents de la Commune:
« Mon cher Jules,
« Hier, lundi 22, nous avons été déménagés et nous sommes actuellement à la Roquette, probablement pour plus de sûreté.
« J’ai vu cette nuit la lune et les étoiles, et je t’écris sur le rebord de ma fenêtre, sous le ciel bleu ; eu reste, ni table, ni chaise. La vie de l’homme peut être très-simplifiée.
« Nous ignorons nos nouvelles conditions d’existence ; elles paraissent ne pas nous faire un isolement aussi complet qu’à Mazas.
« 4e section, n° 6. Grande Roquette. »
16:38 Publié dans Bibliographie, Biographie, Commune de 1871 | Lien permanent | Commentaires (0)
Le Père Clerc dans la revue ETUDES (1875)
Dans la revue Études religieuses, historiques et littéraires par des Pères de la Compagnie de Jésus (1), nous avons retrouvé un article consacré au Père Clerc. Il s’agit en fait du Chapitre VII de la biographie du père Alexis Clerc par Charles Daniel.
Cependant, la courte introduction est inédite donne un bon aperçu de l’excellente considération dans laquelle était tenu le Père Alexis Clerc, en 1875.
LE PÈRE ALEXIS CLERC DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS
Un écrivain dont nous n’avons pas à faire l’éloge dans les Études va mettre au jour la vie d’une des plus sympathiques victimes de la Commune. Les amis du P. Clerc, ceux qui l’ont connu, ceux qui, par conséquent, l’ont aimé, le retrouveront tout entier dans ce portrait tracé par une main fraternelle mais équitable : nature franche, généreuse, ardente, cœur tendre et affectueux, esprit droit, intelligence élevée. Le P. Clerc fut tel dans toute son existence pendant qu’il vécut éloigné de Dieu, bien mieux encore, après sa conversion. Oui, à une époque de sa vie, il dut se convertir : né d’un père voltairien, élevé dans l’Université, il n’apporta à l’École polytechnique que des préjugés sur la religion, qui cependant ne paraissent pas l’avoir entraîné au-delà d’une froide indifférence. Dieu l’attendait à quelques années de là. À partir de 1846, Alexis Clerc devint un fervent chrétien sous l’influence de la grâce, ses progrès dans la vertu furent rapides et nul ne s’étonna de voir le lieutenant de vaisseau changer son brillant uniforme pour l’humble habit de religieux.
Nous avons choisi dans la Vie du P. Clerc le chapitre suivant, qui à l’avantage de former un tout complet joint celui de faire connaître l’état d’âme dans lequel se trouvait le marin au moment où il allait quitter sa carrière.
Suit le Chapitre VII. :
ALEXIS CLERC, LIEUTENANT A BORD DU CASSINI
DE LORIENT A CHANG-HAÏ (disponible ici)
(1) Tome huitième, 19e année, 5e série, Paris, 1875. Disponible sur Gallica : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34415014q
09:27 Publié dans Biographie, Compagnie de Jésus | Lien permanent | Commentaires (0)