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14/02/2021

L’ÉGLISE DU JÉSUS. TRANSLATION DANS LA CHAPELLE DES MARTYRS. (1ère partie)

Nous publions le commencement du sixième chapitre des Actes de la captivité et de la mort, des RR PP Jésuites par le Père Armand de Ponlevoy. Ce chapitre ne figure pas dans l'édition originale de 1872 que nous avons consulté et dont nous avons publié le texte également.

Ce chapitre revient sur divers événements consécutifs à la mort des pères, notamment des apparitions et des guérisons.

Nous le donnons en plusieurs partie, mais il sera ensuite publié ici dans son intégralité. 

La rédaction

Olivaint 1 et 2.jpg

L’ÉGLISE DU JÉSUS.

Translation dans la chapelle des martyrs.

(1ère partie)

 

Il y a bien loin des horreurs du supplice aux splendeurs du dénouement, et cependant, pour les disciples comme pour le maître, le jour de Pâques est tout près du vendredi saint ; à peine le martyr a-t- il incliné la tête sous le glaive, qu’il la relève ceinte d’une auréole. Déjà il n’est plus question de croix, ni de sépulcre, désormais il n’y a plus que la vie dans l’éternel amour, la félicité dans le ciel et la gloire même sur la terre.

Un incident bien singulier m’initia presque immédiatement à ce nouvel état de choses.

Je venais de rentrer à Paris, aussitôt après la double catastrophe, quand je reçois une lettre d’une personne, qui m’était connue par la fermeté de son caractère et l’excellence de sa vertu. M’écrivant de l’autre bout de la France, elle me demandait avec une anxiété qui me surprit, le moment précis du martyre : « Veuillez, je vous prie, ne pas perdre de vue le prix que j’attache à savoir l’heure exacte ou le sacrifice a été consommé ; j’avais des motifs de croire que c’était entre cinq et six heures, le 26. »

Je n’étais pas en état alors de répondre à la question. Même à Paris, on ne savait pas dire l’heure, à peine le jour du sacrifice. Il y avait mille variantes dans les récits. Enfin, quand je me crois sûr du fait, je réponds et demande à mon tour pourquoi on attache tant d’intérêt à ce détail assez insignifiant. Voici la réponse :

« Le vendredi 26 mai 1871, vers six heures de soir, j’étais en train d’écrire et rien de ce que j’écrivais ne pouvait ramener ma pensée sur Paris ni sur les otages, lorsque tout à coup le R. P. Olivaint m’apparut tout souriant. Son teint, jaune ordinairement, était beaucoup plus animé et plus clair que de coutume ; il avait une expression de joie qui donnait à ses traits une beauté vraiment céleste. J’en fus tellement frappée que mon premier saisissement passé j’eus de la peine à me rappeler la figure du R. P. Olivaint telle que je la connaissais. Aujourd’hui encore j’ai des efforts à faire pour me le représenter tel que je l’avais vu la dernière fois. Les traits sous lesquels il m’a apparu se présentent toujours à mon esprit les premiers, lorsque je pense à lui.

« La conviction que le P. Olivaint montait au ciel ne me quitta plus, je crus l’entendre me dire : « Mon enfant, voyez ma joie et qu’elle vous console. » Elle me consola en effet, car une paix d’une suavité extraordinaire remplit mon cœur, qui jusqu’ici n’avait pu envisager avec résignation la pensée de perdre le P. Olivaint.

« Ce sourire qu’il m’avait jeté comme en passant avait eu sur mon cœur une action si puissante que cette mort avait cessé d’avoir ses rigueurs pour moi.

« Cette apparition était presque pour moi une certitude que le crime était accompli. Je ne l’appris en réalité que le lundi 29 mai. »

Le P. de Bengy ne tarda point à donner lui-même son signe du ciel. N’était-il pas juste qu’il l’adressât à sa mère ? Cette femme vénérable par son âge et bien plus encore par sa vertu, et vraiment digne des grandes époques, quand son frère, M. l’abbé de Champgrand, prêtre de la communauté de Saint-Sulpice, était venu lui annoncer la sanglante nouvelle du 26 mai, s’écria tout à coup : « Mon Dieu ! quel sacrifice ! Mais je suis bien heureuse. Vous voudriez me le rendre, mon Dieu, je n’en voudrais pas. » Et comme elle entendait autour d’elle des gémissements et des sanglots : « Vous n’avez pas l’esprit de foi, disait-elle à ses enfants. Vous devriez remercier Dieu. J’ai fait à Dieu entièrement le sacrifice. Point de rapine, répétait-elle, non, point de rapine dans le sacrifice. »

Cette mère était vraiment debout, appuyée sur la croix de son fils ; mais la nature ne put résister. Sur ces entrefaites, une de ses filles, Mme de Puyvallée, partait de Bourges pour Paris. Mme de Bengy lui remet une lettre à déposer sur la tombe du P. Anatole et recommande qu’on commence aussitôt à Paris une neuvaine de messes, à laquelle s’unira toute la famille, pour que la volonté de Dieu se fasse en elle à la vie et à la mort. Le dernier jour de la neuvaine, elle devait, avec tout son monde, partir pour la campagne. Cependant, comme pour se rendre plus sensible l’assistance de son fils, elle fait suspendre près de son lit une grande photographie du martyr avec une parcelle de son vêtement : « À mon chevet, dit-elle à l’ouvrier, le plus près possible de moi, il m’apprendra à bien mourir. » Et voilà que le neuvième jour, devinant elle-même qu’il est temps, elle sonne, fait appeler son confesseur, demande et reçoit les derniers sacrements, entourée de ses enfants, assistée par les frères de son fils. Mgr de la Tour d’Auvergne, archevêque de Bourges, accourt lui-même pour la bénir une dernière fois, et en entrant dans cette chambre, à la vue de ces deux figures si calmes et si sereines, qui semblent se sourire même dans la mort, il donne aussitôt le vrai mot de la situation : « C’est frappant ! s’écrie- t-il ; le fils appelle sa mère. » Le soir même, elle allait rejoindre son fils.

Après cette initiative du ciel, j’énoncerai seulement un principe. C’est Dieu lui-même, avons-nous dit, qui choisit ses martyrs ; disons-le maintenant après le Roi-Prophète, c’est lui-même aussi qui seul glorifie ses élus. Cette vérité, nous la croyons, parce qu’elle est révélée ; mais nous la voyons et la touchons à cette heure, parce qu’une fois de plus, sous nos yeux, elle s’est réalisée. Non, ici l’homme n’a rien fait ; et que pouvait-il faire ? — Pour produire un courant de vénération publique, de reconnaissance et de confiance, large, profond et permanent, il faut de nécessité celle double force motrice, la voix de Dieu et la voix du peuple. Or, l’esprit souffle où il veut, disait le Seigneur Jésus, et personne ne sait d’où il vient. Bien loin d’avoir provoqué le mouvement, j’affirme que nous avons été menés avant tous les autres.

(à suivre)

Anatole de Bengy (bis).jpg

Le RP Anatole de Bengy

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