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17/03/2018

Recensions de livres du RP Charles Daniel (L'Université Catholique - 1896)

Voici une recension de deux livres du RP Charles Daniel, sj. Cette recencion est parue est parue dans 

L’Université catholique, nouvelle série, Tome XXII. Faculté Catholique de Lyon,  Mai-Août 1896

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Bibliographie

  1. Questions actuelles. — Religion, philosophie, histoire, art, et littérature, par le R. P. Ch. Daniel, fondateur des Etudes religieuses. Précédées d’une notice et d’une introduction par les RR. PP. Mercier et Fontaine, S. J. 1896. 1 vol. in—8 de 489 pp. Paris et Poitiers, H. Oudin.
  2. Alexis Clerc, marin, jésuite et ôtage de la commune, fusillé à la Roquette le 24 mai 1871. Simple biographie, parle R. P. Ch. Daniel, de la Compagnie de Jésus. 1895. 1 vol. in-12 de VIII-496 pp. Paris, Téqui.

Le nom du P. Charles Daniel n’est pas encore oublié. Bien que des infirmités douloureuses l’aient condamné, à la fin de sa vie, à une inaction forcée, et lui aient fait rompre brusquement toute relation avec le monde, il a joué un rôle trop considérable pour que sa mémoire s’éteigne si vite, même à une époque où les préoccupations d’hier disparaissent si facilement devant les intérêts d’aujourd’hui. II reste toujours le fondateur des Etudes religieuses, et son rédacteur le plus goûté de la première heure. Comme son activité a été en partie absorbée par des articles de revues, on pouvait craindre qu’elle n’eût plus d’influence sur les lecteurs d’à présent, qui ne songeraient guère à aller chercher ces études dans les collections où elles étaient enfouies. C’est ce qui a déterminé le P. Mercier à choisir les plus remarquables de ces travaux pour en composer un juste volume. Afin que nous puissions les comprendre plus parfaitement et entrer dans l’esprit de celui qui les a composés, le P. Mercier nous donne en même temps une biographie du P. Daniel, et le P. Fontaine a écrit une introduction très claire et très nette, où il nous explique l’occasion qui e fait naître les articles, et l’importance qu’ils eurent au moment de leur apparition.

Quel nom fallait-il donner à ce recueil, composé d’études si variées, nous allions dire si disparates ? Les éditeurs ont choisi celui de Questions actuelles, dont l’exactitude pourrait être discutée. Si l’on peut appliquer cette dénomination à des questions qui ont quelques rapports avec celles qui s’agitent aujourd’hui, qui peuvent, par exemple, se résoudre d’après les mêmes principes, nous n’avons aucune objection à opposer ici. Mais si l’on réserve cette appellation pour les problèmes qui sont à l’ordre du jour, et qui sont de nature à passionner le grand public, elle n’aurait pas dû être donnée à ce recueil. Ne chicanons pas d’ailleurs sur les mots. Nous avons lu avec plaisir et profit ce livre, où il y a tant de belles pages et tant de détails intéressants. L’humble et savant religieux écrit parfois d’une manière admirable, qui rappelle nos grands écrivains du xviie siècle. Dans les polémiques, il change de ton, et devient aussi vivant que précis, aussi pressant qu’imagé. Partout il mérite de retenir l’attention, soit qu’il rectifie un point des Mémoires de M. Guizot, soit qu’il célèbre avec enthousiasme Montalembert et ses Moines d’Occident, soit qu’il esquisse la biographie de Mme Swetchine, soit qu’il expose la banqueroute du protestantisme, soit qu’il montre le chemin qui mène de l’optimisme au panthéisme. Mais n’insistons pas plus longtemps sur ce recueil d’articles : nous avons à parler d’un livre proprement dit composé par le P. Daniel nous voulons dire la biographie du P. Alexis Clerc, l’un des martyrs de la Commune.

Misericordias Domini in æternum cantabo. Telles sont les paroles qu’un vieux peintre espagnol met dans la bouche de sainte Thérèse, comme si elles suffisaient à résumer toute sa vie. C’est aussi l’épigraphe que l’on pourrait donner à la biographie du pieux jésuite. On ne saurait assez admirer la miséricordieuse conduite de la Providence à son égard, et ce que peut la grâce dans la transformation de l’homme. A force de persévérance et de recherches, le P. Daniel est parvenu à reconstituer les détails de cette vie si extraordinaire, et qui devait finir par le martyre. II est intéressant de suivre avec lui son héros à la maison paternelle, où il eut le malheur de perdre trop tôt sa mère, puis dans ces pensions où il s’habitua trop facilement à l’indifférence religieuse, et ensuite à l’Ecole polytechnique, où il se fit aimer de tous par son enjouement et son heureux caractère. Alexis Clerc songea quelque temps devenir professeur ; puis, au grand étonnement de tous, il se fit marin. La Providence, semble—t-il, voulait l’arracher à la maison paternelle, où les exemples de son père, un des premiers actionnaires du Siècle, ne pouvaient être que pernicieux pour lui. C’est en plein océan Pacifique, dans l’archipel des îles Gambier, que devait commencer son retour à Dieu. Il fut émerveillé, comme l’avait été peu de temps auparavant le commandant Marceau, par le dévouement des missionnaires et les heureux effets de leur apostolat parmi les indigènes. Puis, avec sa droiture naturelle, il voulut connaître de plus près cette religion qu’il avait appris à aimer sur les genoux de sa mère, et qu’il avait tant négligée depuis. La Démonstration évangélique, de Duvoisin, suffit à le ramener. Quand il eut fait le dernier pas, en revenant à la pratique des sacrements, il devint un apôtre, et contribua puissamment à convertir plusieurs de ses amis. Puis, en marchant d’un pas ferme et continu dans la voie de la perfection, il crut qu’il devait être quelque chose de plus qu’un marin, et il se fit jésuite.

On le vit alors, modeste surveillant de l’école préparatoire de la rue des Postes, conduire les élèves en promenade travers les rues de Paris. Quand il eut été nommé professeur la même école, il continua de faire le bien en cherchant le silence et l’oubli. Puis, à cinquante-un ans, en pleine activité scientifique et au moment où les moissons les plus abondantes semblaient réservées à son zèle, la guerre éclata, suivie des horreurs de la Commune. Et, pour le nom de Jésus-Christ, auquel il s’était donné tout entier, le P. Clerc tomba sous les balles des fédérés, après avoir ramené à Dieu un parlementaire imbu des traditions gallicanes, le président Bonjean.

Certes, c’est une vie et une mort bien enviables. Le P. Daniel nous les raconte avec un vrai talent d’écrivain, et la biographie qu’il a écrite est palpitante d’intérêt. Nous engageons ceux qui ne la connaissent pas encore à se la procurer, et à apprendre ce que fut cet éminent religieux, appelé à la troisième heure, mais ouvrier d’autant plus infatigable et sans reproche, operarius inconfusibilis.

A. L.

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