10/11/2012
Les obsèques des otages par C. Ordioni
Voici le chapitre VIII de la Biographie de Sa Grandeur Mgr Georges Darboy, archevêque de Paris, avec une notice sur les principaux otages massacrés en mai 1871, par ordre de la Commune... (1871), par Cyprien ORDIONI. Ce chapitre relate très brièvement les obsèques des Pères jésuites massacrés le 24 mai à la Grande-Roquette et le 26 mai à la rue Haxo.
VIII
LES RR. PP. JESUITES
Le R. P. de Pontlevoy, provincial des Jésuites de France, préparant en ce moment une notice sur la vie des illustres victimes de son ordre qui ont été massacrées le 24 mai à la Roquette, nous nous bornerons à donner ici. leurs noms et à faire connaître les détails de leurs obsèques :
Le R. P. Ducoudray, supérieur de l'école Sainte-Geneviève, et le R. P. Clerc, professeur ; le R. P. Olivain, supérieur de la résidence de Sèvres ; les RR. PP. Caubert et de Bengy, ont été massacrés le 26 mai, à Belleville.
Les obsèques de ces serviteurs de Dieu ont eu lieu le 31 mai à l'église du Gesu avec une touchante simplicité.
Une assistance aussi nombreuse que recueillie emplissait la nef et les chapelles de l'église du Gesu, 35, rue de Sèvres ; toutes les classes de la société étaient confondues autour d'un nombreux clergé.
Les corps des cinq victimes étaient modestement rangés devant le maître autel, sans autre décoration funèbre qu'un simple drap mortuaire et quelques cierges. La messe basse a été célébrée par le R. P. de Pontlevoy, provincial de la Compagnie de Jésus.
Après la messe, le vénérable curé de Saint-Sulpice a rendu hommage à la mémoire de ces glorieuses victimes. Dans une éloquente improvisation, inspirée par ce zèle apostolique qui caractérise les vingt ans de son ministère pastoral, il a vivement ému l'auditoire. Voici en substance le fond de ce discours :
« Quel émouvant spectacle que celui de ces cinq victimes étendues sous nos yeux !
Qui ne pleurerait ce P. Olivain, aussi distingué dans sa vie laïque que dans sa vie religieuse, — lui qui a donné au collége de Vaugirard sa véritable célébrité ; qui ensuite est venu, dans cette résidence, épancher dans les âmes les élans de sa piété et de son zèle ; goûté de tous par la sagesse de sa direction et par le succès de ses retraites ?
Qui ne pleurerait le P. Ducoudray, supérieur de l'école Sainte-Geneviève ?—Après avoir puisé la science profane et ecclésiastique à la Faculté de droit et au séminaire de Saint-Sulpice, il était entré dans la Compagnie de Jésus, — avait dépensé toute son intelligence à préparer aux Écoles polytechnique et de Saint-Cyr des ingénieurs et des officiers sur lesquels le pays fonde en ce moment de légitimes espérances pour la réhabilitation de notre patrie déchue.
Et comment oublier ce bon P. Caubert, connu de tout le monde par les nombreux services qu'il rendait dans cette maison ?
Et le P. Clerc, qui avait quitté son grade d'officier de marine pour embrasser la vie religieuse !
Et enfin ce P. de Bengy, illustre par la noblesse de sa famille, plus illustre encore par son dévouement infatigable dans les avant-postes du siége de Paris !
Je pleure sur tous ces morts, parce qu'il révèlent au monde entier la ruine, la honte et les désastres de. nôtre France. Faut-il que la malice de l'impie soit violente, pour le pousser à commettre d'aussi cruels massacre, accomplis avec toute la brutalité du sauvage et la préméditation du scélérat !.
Mais si je pleure sur tous ces malheurs, je me réjouis dans la gloire et les espérances que nous procurent ces martyrs. —Oui, au nom de la théologie," ceux-là sont martyrs qui meurent sous le coup d'une persécution religieuse, qui sont tués par haine de Dieu et de la religion dont ils sont ministres. Y avait-il une autre raison de les mettre à mort ? On n'a pas eu un seul reproche à leur faire. Étrangers à toute discussion politique, ils vivaient dans leur cellule, tout appliqués à leurs études et au salut des âmes.
Donc ils sont martyrs, et si l'Église n'avait pas à se prononcer sur leur canonisation, déjà je vous inviterais à entonner l'hymne de l'action de grâces et à célébrer leur entrée dans le ciel. Ô Église ! tu seras fécondée par le sang de ces victimes. Ô France ! tu seras régénérée par ces holocaustes.
Ô Compagnie de Jésus ! tu peux te réjouir : tu es toujours aussi féconde et ; aussi généreuse ; Y a-t-il un seul point de la terre qui n'ait été arrosé de ton sang, pour la prédication « de l'Évangile et l'affermissement de la foi ? »
Le pieux pasteur termina cette allocution par les conseils que lui dictaient son expérience et son grand amour du bien pour l'Église et la patrie.
17:28 Publié dans Commune de 1871, Compagnie de Jésus | Lien permanent | Commentaires (0)
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